La Cour des comptes du Burkina Faso a rendu public, le 3 avril 2025 à Ouagadougou, les conclusions d’un audit de performance approfondi portant sur le cadre juridique, et institutionnel de la mobilisation des droits et taxes générés par l’activité extractive de l’or et autres substances précieuses dans le pays.
Cette analyse, qui a scruté la période allant de 2017 à 2022, visait principalement à évaluer la capacité du système burkinabè à contrer les Flux financiers illicites (FFI) dans ce secteur important de l’économie.
Système d’octroi de permis opaque et contrôle des revenus insuffisants
L’examen du cadre juridique par la Cour des comptes a révélé des lacunes importantes. Le système d’octroi et de renouvellement des permis miniers est apparu comme étant peu transparent. De plus, l’accès à l’information concernant les opérations et les actes de gestion des entreprises extractives est limité, ce qui entrave la surveillance.
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Un autre point noir soulevé par la conseillère auprès de la Cour des comptes, Sarrah Bazié, est l’insuffisance des contrôles visant à vérifier l’exactitude des déclarations de revenus des acteurs du secteur. Sur le plan de l’intégrité, l’environnement de contrôle a été jugé « moyennement maîtrisé », avec des mesures incitatives jugées « trop dangereuses » au niveau de la valorisation des productions, ouvrant la voie à des sous-évaluations potentiellement lucratives pour les opérateurs.
LaCa également passé au crible les capacités institutionnelles et opérationnelles de l’État dans la gestion du secteur extractif. L’audit a mis en évidence un dispositif de contrôle des quantités extraites et de leurs spécifications techniques jugé défaillant. Par ailleurs, le suivi et le contrôle global de l’activité extractive sont insuffisamment clarifiés et assurés par les organes compétents.
Concernant les structures spécifiquement chargées de la lutte contre les flux financiers illicites, à savoir l’Autorité Supérieure de Contrôle d’État (ASCE) et la Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières (CENTIF), le rapport note qu’elles sont appuyées par des pôles judiciaires spécialisés qui nécessitent d’être dynamisés pour une efficacité accrue.
Capacités institutionnelles et opérationnelles déficientes
L’analyse de la liquidation des droits et taxes par la Cour des comptes a révélé plusieurs problèmes majeurs. La non-fiabilité des bases de calcul utilisées pour déterminer les montants dus à l’État est une source d’inquiétude. De plus, la liquidation partielle de certaines taxes et le recouvrement tardif des redevances proportionnelles constituent des pertes potentielles importantes pour les finances publiques. Au cours de son investigation, la Cour des comptes a recensé des données de redressement de 25 structures, interrogé 96 personnes et dressé 72 procès-verbaux de transaction. Neuf sites miniers ont également été visités dans le cadre de cet audit.
Le président de la Cour des comptes, Latin Poda, a souligné que ce rapport d’audit s’inscrit dans le cadre d’un audit international sur les flux financiers illicites lancé le 18 juillet 2023 par l’Organisation Africaine des Institutions Supérieures de Contrôle (AFROSAI). L’objectif de cette initiative régionale est d’identifier les circuits potentiels de FFI au sein des États membres.
Selon Latin Poda, la restitution de cet audit témoigne de l’engagement de son institution à garantir une gestion rigoureuse des ressources publiques et vise à encourager les acteurs concernés à améliorer leurs pratiques en matière de gestion des fonds publics. En ciblant les revenus miniers, la Cour des comptes a cherché à évaluer la cohérence et la solidité du système de mobilisation face à la menace des flux financiers illicites.
CAROL SAWADOGO